jeudi 20 juin 2013

La notion de sacrifice (1)

1. Introduction :

La notion de sacrifice est présente dans toute la Bible, du premier au dernier livre. Elle en est un des thèmes majeurs. Avec le terme sacrifice, les mots sacrifier et sacrificateurs sont parmi ceux qui sont les plus souvent mentionnés dans l’Ecriture. C’est Dieu le premier qui, dans la genèse, introduit la pratique du sacrifice. Immédiatement après la chute, nos premiers parents, découvrant avec honte leur nudité soudaine, cherchèrent à la masquer avec des feuilles de figuier : Genèse 3,7. Dieu ne s’en satisfit pas. Il pourvut Lui-même à l’habillement dont avaient besoin Adam et Eve en sacrifiant des animaux et en utilisant leurs peaux pour les couvrir : Genèse 3,21. L’Apocalypse se conclut par la vision glorieuse de l’Agneau sacrifié pour le rachat des élus : Apocalypse 5,6. De la première mention à la dernière, le sacrifice est lié à la fois à l’entrée du péché dans le monde et à la rédemption. Il est présenté comme une nécessité pour couvrir le pécheur et rendre possible la réconciliation avec Dieu. Essayons de faire le tour de l’Ecriture pour étudier tout ce que ce thème recouvre.

2. Genèse du sacrifice : la notion de sacrifice dans la genèse

Le 1er sacrifice : Genèse 3,21

Il est intéressant de voir que c’est Dieu, le premier, qui a pratiqué un sacrifice. Le fait que ce soit Lui qui en soit l’initiateur implique plusieurs choses liées à la notion du sacrifice. Le sacrifice d’animaux pour couvrir la nudité de nos premiers parents témoigne :

-          De la gravité du péché et de son entrée dans le monde. Dieu avait pourtant averti nos premiers parents à ce sujet : Genèse 2,17. Le péché, cet acte de désobéissance et de rébellion envers Dieu, ne serait pas bénin. Il aurait une conséquence funeste et dramatique pour toute la race humaine : la mort. Dieu signifie par le sacrifice que, pour épargner la mort aux coupables, il faut qu’une victime innocente la subisse à leur place. Le salaire du péché est la mort, rien de moins : Romains 6,23.

-          De l’incapacité de l’homme à produire un moyen de couvrir sa faute qui soit à la hauteur du préjudice qu’occasionne le péché. Il est impossible à l’homme de se voir tel qu’il est, de se regarder en face ou de supporter le regard de l’autre sur soi depuis l’entrée du péché. La fabrication improvisée d’un habit de feuilles de figuier est la première tentative humaine de se fabriquer une couverture permettant de se rendre présentables aux yeux des autres et de soi-même. Toutes les religions humaines suivent depuis cet exemple. Dieu témoigne par le sacrifice qu’il faut bien plus que le bricolage humain pour satisfaire les exigences de la justice face au péché. Le péché nécessite la mort. Les habits de peaux devront rappeler tous les jours à Adam et Eve qu’une victime innocente a payé de sa vie leur justification.

-          De la voie que la justice de Dieu va emprunter dans l’avenir pour opérer la réconciliation entre l’homme pécheur et le Dieu saint. Le premier sacrifice, initié par Dieu, doit servir d’instruction et d’enseignement aux hommes de toutes les générations qui suivront Adam et Eve. La justice de Dieu ne pourra être satisfaite à moins que la mort du coupable ou de son remplacement par un innocent ne se produise. Cette exigence incontournable n’est pas négociable. C’est elle qui obligera le Fils de Dieu à s’offrir Lui-même en sacrifice pour ôter le péché du monde : Jean 1,29.

Le second sacrifice : Genèse 4,1 à 5

Après Dieu, Abel sera le premier homme à offrir un sacrifice à Dieu. L’objectif d’Abel est le même que celui de Caïn. Il cherche à apporter à Dieu une offrande, quelque chose qui, venant de lui, puisse être reçu de manière agréable par Dieu. L’offrande de Caïn, faite des produits du sol et de son travail, ne sera pas reçue favorablement par Dieu. Seule celle d’Abel sera agréée. Une explication pour comprendre à la fois le refus et l’agrément de Dieu à l’égard des deux offrandes s’impose. L’un comme l’autre, en effet, n’ont rien d’arbitraire.

L’offrande de Caïn était faite des produits du sol. Or, depuis l’entrée du péché dans le monde, Dieu l’a dit : le sol, la terre sont maudits : Genèse 3,17. Le refus de Dieu de l’offrande apportée par Caïn n’a rien à voir avec le métier de l’un ou de l’autre. L’offrande était révélatrice de leur cœur. Or, le cœur de Caïn était mauvais : 1 Jean 3,12. En ce temps où l’athéisme n’existait pas (l’existence de Dieu était une évidence), Caïn savait qu’il dépendait de Dieu pour sa propre vie. Il fallait donc chercher Sa faveur, seule condition pour prospérer dans son travail. Caïn ne prit pas école de la voie que Dieu avait indiquée à Adam et Eve pour être agréé par Lui. Il agit envers Dieu davantage par formalité que par souci de demander Sa grâce sur sa vie. Il crut à tort que Dieu se satisferait de ses quelques productions. Il fut immédiatement éconduit.

Abel prit à la fois exemple sur Caïn et sur Dieu. Il suivit son frère aîné dans la demande adressée à Dieu d’être béni. Mais il prit soin de prendre acte du témoignage rendu par ses parents sur la façon avec laquelle Dieu les avait couverts après leur faute. Il comprit que seul le sang versé rend possible l’approche de Dieu : cf Hébreux 9,22. Ayant emprunté la voie indiquée par Dieu, Abel vit son offrande reçue et agréée.

L’offrande d’Abel nous rappelle que, sans l’œuvre de la croix, tout ce que nous pouvons faire et apporter à Dieu reste marquée par la malédiction due au péché. La faute de Caïn est d’avoir minimisé la réalité du gouffre qui sépare l’homme pécheur du Dieu saint. L’intelligence d’Abel est de l’avoir compris. Caïn fut condamné pour sa légèreté à l’égard de Dieu. Abel fut déclaré juste pour avoir pris la juste mesure de ce qu’exigeait la justice de Dieu envers lui : Hébreux 11,4. Le sacrifice offert par Abel est un type et une anticipation de celui de Christ : Hébreux 12,24.

Les autres sacrifices dans la genèse :

Genèse 8,20-21 : un holocauste

Les sacrifices offerts par Noé interviennent après le déluge, à la sortie de l’arche. Ils sont le premier acte accompli par le patriarche sur la terre nouvelle, purifiée du péché passé, que Dieu lui offre. Les sacrifices offerts ici n’ont pas valeur d’expiation (c’est le déluge qui a servi à cela), mais de consécration et de reconnaissance envers Dieu. Nous verrons plus tard dans le lévitique que les sacrifices que Dieu préconisera à Israël peuvent recouvrir cinq significations possibles. La même idée de reconnaissance à Dieu se retrouve dans les sacrifices offerts par Jacob à certains moments clés de sa vie : Genèse 31,54 : conclusion d’une alliance avec Laban définissant les clauses de leur relation future : Genèse 46,1 : voyage de Jacob d’Egypte pour retrouver son fils Joseph qu’il croyait mort depuis des années. 

Genèse 22,1-2 : le sacrifice d’Isaac

Mis à part celui de Jésus, le sacrifice d’Isaac est la seule demande d’un sacrifice humain ordonnée par Dieu. Telle qu’elle est formulée, la demande témoigne de l’objectif poursuivi par Dieu en la présentant à Abraham. Dieu veut sonder le cœur du patriarche. Il veut savoir si la bénédiction qu’Il lui a octroyé après des années d’attente, son fils Isaac, est à sa juste place dans son cœur ou non. Il ordonne donc à Abraham un sacrifice, celui de ce fils unique qu’il possède par Sara, son héritier qu’il aime par-dessus tout.


Le sacrifice, dans la perspective indiquée ici, s’apparente à un holocauste. L’holocauste est le don maximal. Rien ne peut le dépasser. C’est le don entier de ce qui nous est cher, précieux sur l’autel de Dieu. L’holocauste est synonyme d’abandon. Il résulte de la décision volontaire d’un offrant de ne plus rien garder ou retenir pour soi pour répondre à l’appel de Dieu. Pour être agréé et valable, là encore, ce n’est pas l’homme qui est à l’origine de l’initiative de l’holocauste. L’holocauste procède de l’appel de Dieu qui est toujours premier : Esaïe 6,8 ; Luc 9,57 à 62. Dieu seul connaît en effet les idoles de notre cœur qui risquent d’entrer en concurrence avec notre attachement à Sa Personne : Matthieu 19,20 à 22. D’offrande par laquelle Dieu renoue la relation rompue avec l’homme, le sacrifice devient moyen par lequel le racheté peut à son tour s’offrir à Dieu.

2 commentaires: